J'aimerais juste peut-être vous faire connaître une publication d'avril 2015 qui examine précisément les événements de janvier au regard de la pensée des lumières.
Tolérance : le combat des lumières
Chaque texte de ce recueil est une véritable perle, et il me semble qu'il y a plusieurs idées qui mériteraient clairement encore de faire leur chemin dans nos tête, 200 ans plus tard. Je vais donc juste me permettre d'en paraphraser quelques-unes :
* admettons que des caricatures offensent Dieu, le Prophète, ou une quelconque autre émanation d'une divinité. Ne croyez-vous pas qu'il est profondément fort de café d'estimer que cette émanation divine ne peut pas se défendre seule, et que c'est à nous, pauvres petits êtres humains minuscules, de la défendre ?
* la liberté d'expression s'arrête, il me semblait que c'était évident, là où la loi lui dit de s'arrêter. Il existe donc pour pas mal de choses que vous citez le droit de porter plainte pour diffamation. Il est donc tout à fait bon pour la société de laisser la liberté d'expression aux journalistes, y compris de dire du mal de personnes, parce que de deux choses l'une :
1. ou bien le journaliste avait raison (comme l'immense majorité des cas pour le canard, qui a gagné je ne sais pas combien de procès intentés pour diffamation...) et alors il est bon que le peuple sache les exactions commises par certains des puissants
2. ou bien le journaliste avait tort et il sera assigné à réparation (publication d'un démenti, excuses, voire amende, et au cachot s'il ne veut pas). Ainsi les honnêtes gens ne pourront pas être troublés par de fausses affirmations émanant de la liberté de la presse.
Pas mal d'avoir dit ça au XVIIIe siècle je trouve, vu la résonance dans la vie de tous les jours...
* et la plus belle pour la fin : il paraît juste de s'attaquer au fanatisme. Quoi de plus illogique que de vouloir contraindre l'autre à penser comme soi, puisque précisément si on le fait c'est qu'il y a de grandes chances qu'on ne veut pas, soi, changer de croyance, et qu'on détesterait être contraint par la force à penser autrement ? De plus il est difficile de s'écarter plus radicalement de la plupart des préceptes de l'immense majorité des religions en ce faisant. Les religions disant la plupart du temps que nous sommes le fruit de divinités, qui nous chérissent donc probablement comme étant leurs enfants, ne serait-il pas une offense à cette divinité que de torturer voire tuer d'autres êtres humains, eux aussi enfants de cette divinité ?
Accuser charlie par ex. de ne pas être clairement contre les fanatiques mais d'être un peu aussi contre l'islam et le christianisme : je veux bien le croire. Oui, les paroles, les écrits encore plus sont souvent sujets à interprétations et il est difficile de croire que toutes les interprétations seront convergentes et que personne n'y verra autre chose qu'une critique du fanatisme. Oui, vous avez raison.
Cela dit, quand pour démontrer cette thèse (à savoir "Charlie combat l'islam et le christianisme") les gens en sont réduits à *changer* les caricatures (en gommant le mot "radical" pourtant écrit en toutes lettres dans "islam radical" et "bible radicale" et en le transformant en "islam" et "bible") alors cela devient de la propagande et du mensonge éhonté. Et d'un coup, ça change la donne.
Quant à l'économie, peut-être faut-il là encore relire les textes des lumières, notamment Candide qui y décrit un monde où l'or n'est qu'un vulgaire caillou. Si cela semble trop saugrenu à certains, alors qu'ils aillent rechercher des zones où les colliers de perles de verres ont bien plus de valeur que de l'or, dans la vraie vie : je ne vois absolument pas pourquoi on devrait se moquer et dire que "l'or, c'est différent". Parce qu'il faut plus d'énergie pour fabriquer de l'or que pour fabriquer du verre ? Ah mais il faut encore plus d'énergie pour fabriquer et conserver certains éléments chimiques encore moins stables... est-ce que pour autant ces composés ultra rares sont recherchés ? :)
On remarquera d'ailleurs qu'aujourd'hui contrairement à ce qui a été écrit, on ne se rue pas vers l'or comme valeur refuge mais vers la propriété terrestre. Avoir une maison et un champ à cultiver, ça sera toujours l'assurance de vivre correctement, quelle que soit la conjoncture.
On peut par contre se désoler que le travail soit devenu artificiellement rare et que le chômage ait tant d'impact. Le progrès technique a sorti 90% des gens du travail forcé dans les champs pour plonger 10% des gens dans le visionnage forcé de conneries à la télévision. On aurait pu faire mieux, certes, et il est dommage que quand un outil fasse le travail d'un humain, au lieu de réduire le travail de chacun, on licencie, mais on aurait pu faire pire aussi.